Je pourrai dire que Maules n'est pas le Valais, mais je m'abstiendrai car un autre plus autorisé que moi s'est exprimé en ces termes avant et avant l'heure :
Citation repiquée sur :
www.lagruyere.ch
Maules
Une histoire en pleine fusion
Maules, première étape d’un tour de villages sud fribourgeois. Maules, 221 âmes, un village sans bistrot, dont le nom vient de «moles», souvenir de cet éperon rocheux qui donnait de la pierre pour moudre le blé. Maules, village pour lequel le grand moment est en quelque sorte la fin de sa propre histoire…
Depuis le village, on voit les champs et les forêts... (C. Haymoz)
Aucune route ne conduit à Maules. Aucune route importante, aucune route qui compte, de celles que l'on prend pour aller au travail ou pour partir en vacances. Maules est un village perdu, sur le flanc des Monts-de-Riaz. Pour y accéder, il faut passer par Vaulruz et prendre la route de Sâles puis, assez vite, on fait un crochet par Maules. Aucune autre route que celle-là ne quitte l’endroit. Il y a bien deux chemins goudronnés, de chaque côté de l’école, en haut du village, mais ils se perdent dans les champs et dans la grande forêt du Dévin. Sur la route de Maules, on ne croise personne sinon des chaperons rouges qui portent en bandoulière le ruban fluorescent de la prévention routière. Quand on arrive à Maules, on arrive face à la chapelle «fermée pour cause de rénovation à l’intérieur», dit l’affiche agrafée sur la porte. Il y a aussi un grand panneau de bois qui dit «Bienvenue à Maules». Depuis le village, on voit les champs et les forêts et les montagnes de la Gruyère, jusqu’aux Alpes là-bas, en France. On voit aussi la A12, ou plutôt on la devine aux camions qui traînassent sur l’interminable tronçon de Vaulruz. A Maules, il n’y a pas de café. Si l’on veut manger le menu du jour, avec une soupe en entrée, il faut aller à l’Auberge de la Couronne à Sâles, c’est-à-dire au buffet de la gare, car Sâles a une gare. D’ailleurs, il y a tout ce qu’il faut à Sâles. Une église et son cimetière, une poste, une grande école avec une plaque au-dessus de la porte en mémoire du plus illustre citoyen de la commune: «Joseph Bovet 1879-1951, chanoine honoraire de Saint-Nicolas, professeur à l’Ecole normale. Par son sacerdoce et l’enseignement de la musique et du chant, il a servi Dieu et la patrie.»
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Maules a son histoire, mais sa grande histoire, c’est sa fusion avec les communes de Sâles, Romanens et Rueyres-Treyfayes. Le 26 septembre 2000, les citoyens de Maules refusent la fusion «en raison de trop de détails non réglés», dit le journal. Ils sont 58 citoyens à voter non et 39 à voter oui. Un mois plus tard, le 30 octobre, ils acceptent la fusion par 65 oui, 36 non et 3 bulletins blancs. Car on a fait voter à nouveau les citoyens de Maules, et cette fois en présence des autorités. Le chef de service du Département des communes et le président de l’Association des communes fribourgeoises sont dans la salle. Trop de tensions dans le village, trop de complications, trop de doutes, trop de communes qui fusionnent ou qui s’y préparent, Posieux, Ecuvillens, Avry-sur-Matran, Corjolens, Chavannes-sous-Orsonnens, Orsonnens, Villargiroud, Villarsiviriaux, Lentigny, Lovens, Onnens, Ursy, Vauderens, Bionnens, Mossel... Mais pas Maules! Il fallait bien s’exprimer une seconde fois. «Un citoyen s’est levé pour dire que la fusion était une alliance avec d’autres gens de la même région au-delà des inimitiés, que la guerre froide était terminée et le Mur de Berlin tombé. Nous n’allons pas ériger un mur autour de Maules, s’est-il exclamé. Un jeune a demandé aux aînés de penser à l’avenir...», dit encore le journal. La grande histoire de Maules, c’est en quelque sorte la fin de son histoire.
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Maules vient du latin moles, à cause des meules parce que, jadis, un éperon rocheux près du village donnait de la pierre pour moudre le blé. En 995, le lieu s’appelle Molas superiores, puis Molis et Moles. En 1137, pour le remède de son âme, Guillaume de Maules offre au couvent d’Humilimont les terres qu’il possède au-dessus de Vaulruz, sur les flancs sud-ouest du Gibloux, puis, au début du XIIIe siècle, Maules appartient à Guy de Montagny, puis à Antoine de La Tour, seigneur d’Illens, tandis que les de Blonay ont Sâles et Vaulruz. Le 10 mai 1377, Jacques Champion, qui avait épousé Guillermette de Blonay, achète cette seigneurie comme il achète Maules, dix-sept ans plus tard, le tout pour 1479 florins. Sous les Champion, la seigneurie de Vaulruz comprend Vaulruz, Sâles, Maules et Romanens. L’Etat de Fribourg acquiert l’ensemble pour 5000 écus en 1538. Un fléau s’abat sur Maules et sur les villages alentour en 1699. La vermine, sans doute une invasion de chenilles, anéantit les cultures. Les habitants s’engagent alors à chômer à la Saint-Garin, à la Saint- Théodule et à la Saint-Magnus, à sonner tous les samedis le couvre-feu et à réciter à ce moment-là cinq Pater et cinq Ave. Ces actes de dévotion sont approuvés par l’évêque à l’occasion de sa visite pastorale, en 1719, mais, trente ans plus tard, l’envie n’y est plus et les autorités demandent au curé d’imposer une amende à ceux qui transgressent les vœux de 1699. Au-dessus de la porte de l’école, il n’y a pas de plaque pour rappeler le souvenir d’un enfant du village, Antoine de Pasquier, qui s’appellera Vonderweid lorsqu’il sera admis à la bourgeoisie de Fribourg, en 1608, lui le grand voyageur qui est allé en France et en Italie pour étudier les sciences sacrées, devenir docteur en théologie et être nommé protonotaire apostolique.
Claude Zurcher, parti à la recherche de ces localités inscrites dans les marges de la géographie et du temps. Dans ces lieux que ne mentionnent pas les guides touristiques. Avec la volonté de raccrocher au grand mouvement de l’époque les ambiances du moment présent et les histoires du passé. Pour son premier papier, il tisse une gerbe de mots autour de Maules, ce village qui s’est manifesté durant quelques semaines pour son opposition à la fusion des communes de la paroisse de Sâles. Simple prétexte à une balade historique et littéraire.
Claude Zurcher / 14 novembre 2000
Fin de citation.
Il y a 9 ans, certes, mais j'espère que tous ses habitant n'ont pas construit de blockhaus aménagé en fébrile habitation, tout en quadrature, tout en béton, cubique, commune, bref tout en reflet de l'image d'un concept renfermé sur un nombril exacerbé par un grave manque d'ouverture...
D'ailleurs, je ne l'ai pas dit... Claude Zurcher l'a fait pour la Gruyère en 2000...
C'est peut être de l'humour potache et crasseux, mais c'est une forme d'humour qui en vaut d'autres...
A bon lecteur...